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Pierre-Paul Bertin, peintre, sculpteur, graveur, muraliste
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Démarche artistique

Un art de qualité, polyvalent, qui s’est transformé au contact de la nature québécoise

Qualifier la démarche artistique de Pierre-Paul Bertin, en quelques lignes, s’avère un grand défi, car comment résumer une œuvre aussi considérable, faire une lecture a posteriori de ses intentions, de son cheminement, de ses choix d’expression – alors qu’il n’a jamais écrit sur son art? Heureusement, demeure son œuvre, qui parle pour lui. Ce qui frappe, quand on consulte les courts commentaires faits sur son œuvre, c’est l’utilisation de l’hyperbole. Un signe que les mots sont insuffisants?... Il faut d’abord regarder. Faire sa propre lecture. Et essayer de conserver intacte la forte impression qu’elle laisse. N’a-t-il pas eu ce beau commentaire : « c’est le silence en face d’une œuvre qui compte1 » ?

Chose certaine, tous s’accordent pour reconnaître la solidité de la formation de Pierre-Paul Bertin, le milieu stimulant dans lequel il a évolué en France, la polyvalence de son expression artistique, ses qualités de dessinateur et de coloriste, et le fait que son contact prolongé avec la nature québécoise a transformé son art. Cet art a été amplement reconnu dans sa première phase de vie, en France – cette forte impulsion lui assurant, encore après son arrivée au Québec, plusieurs prix en France et en Europe.

Une solide formation

À part ses études à Reims, insistons sur d’autres éléments de sa formation. Tout d’abord, le choix, si humble et combien significatif, d’apprendre « tous » les métiers qui ont enrichi son art de travailler la matière. Écoutons-le se raconter:

« J’ai appris la plupart des aspects de mon métier à l’occasion de stages pour me perfectionner dans diverses techniques. (…) J’ai donc étudié successivement, avec beaucoup d’enthousiasme, dans des lieux différents : dans un bureau d’études pour la résistance des matériaux et l’application de techniques; dans un cabinet d’architectes pour l’élaboration et l’étude de plans; chez des décorateurs pour les tissus, les papiers couleur (…). Chez les antiquaires, j’ai pratiqué des retouches importantes sur les tableaux et les meubles de haute qualité. J’ai été copiste au Louvre pour comprendre les techniques des Maîtres et gagner ma vie. (…) Tout a été abordé : le sablage, la soudure, le brasage, le travail à la forge chez un maréchal-ferrant. Ainsi j’ai acquis beaucoup de savoir-faire grâce à l’expérience directe des gens de métier. (…) Un stage extraordinaire, dans un atelier de tôlerie, m’a inspiré le goût de créer mes premières pièces importantes en acier soudé ».

Ce qu’il faut retenir, c’est ce goût d’apprendre, l’énergie, le respect des métiers, l’apprentissage de la polyvalence.

Polyvalence de son art

Ce qui frape quand on considère l'œuvre de Pierre-Paul, c'est le fait qu'il ait pratiqué, à fond, les multiples médias de l’art visuel : encre, encre couleur, gouache, huile, collage, composition textile, sculpture (avec plusieurs matériaux : acier soudé, pierre gravée, bois-cuivre, bois, fil d’acier). Cette polyvalence est significative de son grand désir de créer. « Il y a tant à dire qu’un seul médium ne peut tout contenir », commente-t-il pour s’expliquer. Ou, dit autrement : « ce que je ne peux pas exécuter en peinture, je le fais en sculpture et vice versa ». Celui qu’il a qualifié de « directeur de conscience artistique », Jean Rumeau, le constate : « Tu es multiple ». Il avait un message à exprimer, celui de son regard sur la nature et le monde, et ce message était tellement puissant, important, impétueux, qu’il appelait chez lui l’urgence de le dire avec tous les moyens possibles d’expression. Sa conjointe, Paule Robert, dit de lui : « Il n’arrêtait jamais de travailler, passant régulièrement 16 heures par jour dans ses ateliers ».

En dialogue avec des grands maîtres

Solitaire comme tout grand artiste, plongé dans son besoin constant de création, Pierre-Paul Bertin restait aussi un être de dialogue avec ceux qui ont été ses maîtres ou ses contemporains, du temps de sa jeunesse. Un journaliste de Reims, Hubert Claisse, rappelle que Bertin a « connu Villon, Zadkine, Gromaire, Kijno et Riopelle » et qu’il a côtoyé les plus grands – Buffet, Chagall, Picasso, Dunoyer et Robeyrolle.

Excellence du dessin et harmonie des couleurs

Pour exprimer son message, il possédait, selon les observateurs, deux grandes qualités : une habileté incroyable à dessiner, tout comme celle, toute particulière, de coloriste. Chez-lui, le dessin surgissait d’emblée, prenait forme sur le matériau choisi, sans hésitation, porté par une certitude, celle de ce qu’il avait à dire, avec le plein contrôle de son outil d’expression. Chez-lui, la couleur était au service du dessin, jamais une fin en soi, mais un moyen dont il savait explorer les multiples harmoniques et qui lui servait à composer un tout porteur d’une idée et d’une émotion. Il savait proposer des fondus enchaînés, qui traduisent la belle unité de la nature, ou des contrastes surprenants, par lesquels il se rapprochait de l’art abstrait.

Un ex-directeur de l’Institut supérieur de Peinture décorative de Reims, Jean Giacomino, écrit: « On y trouve (dans ses œuvres) la vérité inscrite dans les lignes précises, dans les flous, dans les jeux d’ombre et de lumière autant que dans l’invisible qui devient presque sensible à nos doigts, autant que dans l’inexprimable qui parle à notre esprit attentif ».

Il dévoile une partie de son secret quant à sa manière de peindre, en disant : « J’exécute beaucoup d’esquisses, de dessins, de mises en place au départ sans savoir si je me rendrai loin dans le sujet. C’est une longue pellicule mémorisée. Quelquefois j’entreprends directement la toile avec toute la fougue nécessaire. (…) Pour parler de la nature, son perpétuel mouvement avec ses pleins et ses déliés offre au peintre une sorte d’écriture qui lui devient propre et originale ».

Son arrivée au Québec = transformation de son art

Son arrivée au Québec a entraîné une transformation de son art et une stimulation constante : « Je demeure toujours aussi impressionné et fasciné par ces grands paysages, ces hivers, ces tempêtes que j’ai souvent interprétées. Cela m’a demandé des années de présence au Québec pour épurer ce tourbillon par un seul trait linéaire. (…) Je suis envahi par ses deux saisons majeures : l’automne et l’hiver ». Il ajoute : « Je peux dire simplement que, dans ce pays (du Québec), je me suis enrichi d’une palette différente par les éclats ou par les couleurs sourdes. L’animation intérieure guide la transcription pictural ».

Un art reconnu

De 1946 à 1967, en l’espace de 21 ans, il participe à plus d’une centaine d’expositions et de salons. Exemples : on le retrouve en 1962 au Salon de Nîmes. 1963 et 1964 sont deux années fastes : il présente une exposition solo à la Galerie Paul Ambroise à Paris et on le retrouve dans des expositions à Rouen et à Sarreguemines (1963); en 1964, à des salons de Deauville, Ibaїa, et Beauvais. En 1966, il est présent au XVIII e Salon de la jeune sculpture, à l’occasion du Festival du Marais, Place des Vosges à Paris.

Au cours des années 1964 et 1965, il cumule les récompenses. En 1964, le Salon international de Deauville lui décerne le Grand prix du paysage et il est sélectionné pour participer à l’exposition de groupe des récipiendaires à La Povincetown Art Gallery, Forest Hills, New-York. En 1965, on compte notamment les prix suivants : la Médaille d'argent lui est décernée au Salon de l'Europe à Bruxelles; au Prix L’Île de France, le premier prix du dessin lui est attribué pour son œuvre Route de Méru à Beauvais − le dessin sera acquis par le Château de Sceaux; et il est reçu Vice-chancelier de l’Ordre de Saint-Luc de l’Académie des arts de la Palette Française.

L’intensité de sa création et la reconnaissance qui lui est accordée lui vaudront d’être sélectionné pour représenter la France au Symposium de sculptures de Québec en 1966. On connaît la suite…

Une fois installé au Québec, sa notoriété en France et en Europe continue à lui attirer d’autres récompenses, en même temps que le Québec, plus tardivement, amorce un processus de reconnaissance.

Mentionnons, du plus récent au plus éloigné :

En 2009, une de ses sculptures, Hommage à Zadkine, a été fondue en bronze et sise à la Place Pierre-Paul-Bertin, elle-même attenante à une rue de la ville de Québec (arrondissement Beauport ) qui porte son nom. Deux expositions importantes ont été tenues en 2008, à la Bibliothèque Étienne-Parent, arrondissement de Beauport, et en 2009, au Centre d’interprétation de la Côte-de-Beaupré – expositions qui ont d’évidence contribué aux décisions ci-haut mentionnées de la Ville de Québec, de la Commission de la capitale nationale, et du Gouvernement du Québec.

Janvier 2000, lors d’une importante exposition qu’il tenait à Paris dans le XVIe arrondissement, il reçoit du Gouvernement français, par l’intermédiaire du Ministre et Maire Pierre-Christian Taittinger, les insignes de Chevalier de l’Ordre des Arts et des Lettres. Une brochure publiée à l’occasion de cette exposition contient des messages élogieux du Premier ministre du Canada, Jean Chrétien, du Premier ministre du Québec, Lucien Bouchard, de l’ambassadeur du Canada en France, Jacques Roy, et d’autres personnalités politiques.

Entre 1992-1999, le rythme des récompenses est soutenu : membre de la Fondation Taylor à Paris (1999); Commandeur académique, section Art, de l’Ordre Académique Greci-Marino en Italie (1998); juge au Premier symposium de sculptures qui s’est tenu à Fukuoka au Japon (1996); 1er Prix de gouache au Salon international de Trégastel en France (1994); Médaille de Vermeil de l’Académie Internationale de Lutèce à Paris, section Beaux-Arts (1992). Au milieu des années 80, il est récipiendaire de la médaille d’Or de la Société Arts-Sciences-Lettres à Paris (1985).

Admettons-le : cette reconnaissance, par des pairs et des critiques, par des galéristes et des amateurs d’art, par des autorités gouvernementales, en France, ailleurs en Europe, et au Québec, constitue une sanction qui vaut son pesant d’or – et qui doit peser sur celle du marché.

1 Nous citerons des témoignages directs de Pierre-Paul Bertin, à partir de deux sources: les premiers consignés dans un documentaire inédit de 46 minutes, réalisé par Paul Bourgeault et André Dufour, et intitulé Le temps de Bertin; nous emprunterons aussi des extraits d’entretiens réalisés, en 1998, par Maryvonne de Raymond, en vue d’un projet de livre (lui aussi inédit). Nous remercions ces personnes pour la permission accordée de citer leur œuvre.

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Réalisation du site / Dernière mise à jour : décembre 2010